Édito : Vous avez dit "démocratie" ?

Quelle tristesse de voir à quel point de déliquescence en est rendue cette 5e République.
Affaires après affaires, le bateau ivre tangue, la lutte fait rage pour les meilleures places sur le pont. Les coups bas pleuvent, les tacles également: au sein d’un même parti on n’a rien d’autre en tête que de détruire, avant l’échéance suprême, la candidate ou le candidat déclaré.
Sondage après sondage, petites phrases, mots plus ou moins «bons», CNE ou CPE, projets de lois sur l’immigration «choisie» ou «subie» vont titiller les plus vils phantasmes de l’étranger «qui vient manger le pain du français» comme le disait si bien Fernand Raynaud.
Mais lui, c’était un humoriste!
Et ils ne sont pas drôles ceux qui nous dirigent aujourd’hui! Certes ceux qui postulent pour les remplacer sont parfois pire. Si, ça existe!
Jean-Marie et Philippe sont pour l’immigration zéro. Eux ils ne veulent même plus que des petits Nicolas puissent éclore... C’est vrai que tout bien réfléchi... mais bon, quand même!
Eh oui, c’est plus facile de ratisser large en s’adressant aux instincts les plus bas, ils sont épidermiques, il n’y a pas de grandes théories à échafauder.
Une poule a été volée au village, c’est forcément l’étranger de passage qui lui a tordu le cou!
Pensez donc, ce ne sont pas les nantis qui tirent toujours plus la couverture à eux. Et, heureusement, nous sommes en démocratie!
Ah oui, tiens, parlons-en de la démocratie!
Notre président de la république? 19% des votants voulaient en faire leur président, les autres ont voté contre des idées et non pour un programme.
Le Premier ministre: un technocrate qui ne s’est jamais présenté à une élection.
Le Parlement: Une assemblée de notables qui ont fait profession de la politique et n’ont, bien souvent, d’autre ambition que de caresser tout ce qui passe à leur portée dans le sens du poil. On ne sait jamais, cela peut faire une voix... Et ainsi on dure! Et ainsi à 75 ans passés ils seront nombreux à se remettre en piste pour préparer l’avenir de la France. Le Sénat, c’est pire encore!
La décentralisation: l’art et la manière de transférer les problèmes sans mettre en face les moyens de les résoudre. Nous avons pu voir dans notre département ce qu’il restait de pouvoir aux citoyens lorsque le préfet est passé par là.
Et cependant, et heureusement pour nous, nous sommes en démocratie!
Mais la vivons-nous vraiment cette démocratie?
Des syndicats squelettiques, des partis politiques sans adhérents, des associations qui meurent faute de bénévoles.
Des femmes, des jeunes qui voudraient s’investir, il y en a encore. Mais comment le peuvent-ils? Il faudrait pour cela virer les éléphants, tout est verrouillé!
Aussi longtemps que nous n’aurons pas la proportionnelle, que les mandats ne seront pas limités à un, voire deux exercices, aussi longtemps qu’un député pourra être maire et... président d’une bonne douzaine d’institutions, aussi longtemps qu’élu pourra être une profession pour toute une vie, nous aurons les mêmes soucis.

Michel Bordes